Avis sur Avant les années terribles
Titre : Avant les années terribles
Auteur : Victor de l’Arbre
Editeur : Destiny
Année : 2019
Pages : 464
Genre : Récit
Qualification:
A propos de l’auteur
Vainqueur de l’arbre (Barcelone, 1968) fait partie de ces auteurs qui possèdent le curieux don de vous faire passer du bon comme du mauvais avec ses romans. Ancien mosso d’esquadra, ancien séminariste, a étudié l’Histoire à l’Université de Barcelone. Il commence à frapper aux portes de la littérature avec Le Poids des morts, La Tristesse du samouraï (Prix du Polar 2012) et le spectaculaire One Million Drops (Grand Prix de Littérature Policière 2015). En 2016, il remporte le prix Nadal avec son roman La veille de presque tout, et en 2017, il publie Above the Rain. L’année dernière, il a été fait Chevalier des Arts et des Lettres de la République française. Presque rien.
Synopsis d’Avant les années terribles
Isaías a réussi à se créer une vie tranquille à Barcelone, une ville où il est venu faire taire les fantômes d’un passé terrifiant. Il gagne sa vie en restaurant des vélos et est heureux avec sa compagne Lucía, avec qui il attend un enfant. Mais son monde va basculer lorsqu’il reçoit la visite d’Emmanuel, un de ces spectres d’un autre temps, d’une autre vie, lui demandant de retourner dans son Ouganda natal pour participer à une série de réconciliations historiques.
Avant les années terribles, l’aventure (et le danger) de vivre
Avant les années terribles C’est toute une expérience, un roman cent pour cent Víctor del Árbol. Le lecteur extérieur à l’œuvre de l’auteur barcelonais se demandera ce que cela signifie, eh bien, un roman de Víctor del Arbol est une œuvre intense, intelligente et belle, aussi dure (parfois très longue), qui navigue dans les eaux du thriller et le roman policier mais qui ne coule pas là, mais conquiert d’autres eaux, couvrant beaucoup plus. J’ai classé ce livre comme Narrative ci-dessus dans la fiche technique, le mot le plus général que j’ai trouvé, puisqu’un roman de del Arbol n’a longtemps été ni plus ni moins que cela : un roman, de la pure littérature.
A cette occasion, après avoir voyagé dans l’Espagne franquiste, la Russie des goulags ou l’Argentine de la dictature de Videla dans les histoires précédentes, del Árbol passe le relais de sa nouvelle œuvre à Isaías Loweri, un personnage qui donne la parole à l’un des plus sanglants et les conflits les plus douloureux des dernières décennies du XXe siècle : la guerre civile en Ouganda et les conflits qui en ont découlé jusqu’à nos jours, mettant l’accent sur le drame des enfants soldats, l’une des honteuses taches indélébiles sur l’histoire de l’humanité.
Le roman traite de thèmes universels très intéressants et complexes tels que l’amour et la haine, la famille et la recherche de soi, la moralité, plongeant dans les conceptions du bien et du mal, avec une pertinence particulière pour la fin de l’innocence, la corruption de l’enfance. Et il le fait de manière intime et émotionnelle, développant magistralement les personnages, racontant chaque détail avec soin, vous transportant dans ces vies, dans ces mondes. Pour cela, il est aidé par une excellente narration à la première personne d’Isaías qui vous plonge pleinement dans son parcours et un balancement continu dans le temps qui aide à voir l’image de sa vie dans son intégralité.
Dans ce livre il y a des personnages à l’honneur (Isaías, Lucía, Emmanuel, Joel, Mamie…) et des personnages de l’ombre, dont certains dont la simple évocation de leur nom donne déjà des frissons. La palme revient à Joseph Kony, un vrai personnage, chef de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA), le groupe paramilitaire qui opère en Ouganda depuis 1987, connu pour l’enlèvement de dizaines de milliers d’enfants pour en faire des soldats ou des esclaves sexuels. . Au fur et à mesure que l’intrigue progresse, Kony se révèle être un personnage fondamental, un catalyseur d’une partie du désastre et des malheurs qui frappent des milliers d’Isaías.
Le grand triomphe d’Avant les années terribles est de raconter une histoire dure du cœur et avec des passages effrayants, la faisant suinter de vie et d’humanité malgré la narration de certains des épisodes les plus sombres et les plus dévastateurs dont on se souvient dans l’histoire récente. Une œuvre émouvante et complète, pleine de phrases mémorables, d’un auteur déjà incontournable. Une déclaration courageuse avec un message clair : plus d’enfances volées.
« Un tir est une petite chose. L’amour est une grande chose. Et parfois, de petites choses détruisent de grandes choses.
Vainqueur de l’Arbre en planète des livres.