Critique de Dracula de Bram Stoker

Titre : Dracula

Auteur : Bram Stoker

Traduction : Flora Casas

Année : 2002 (d’origine 1897)

Editeur : El País Aventuras (Groupe Anaya)

Pages : 474

Genre : Horreur

Qualification:

A propos de l’auteur

Bram Stoker (Clontarf 1847- Londres 1912) portera son nom lié à celui de dracula pour toute l’éternité. L’écrivain irlandais est entré dans l’histoire de la littérature avec sa version victorienne du mythe vampirique par excellence, reformulant des concepts tirés du folklore d’Europe de l’Est, et s’inspirant de la figure du redoutable Vlad l’empaleur (prince valaque célèbre pour sa cruauté envers ses ennemis) pour créer un personnage universel. Comme cela arrive généralement dans ces cas, le succès n’est pas venu à Stoker de son vivant, son travail ayant été relancé dans les années vingt du XXe siècle, après la création de Nosferatusl’adaptation cinématographique de murnau. La légende de Dracula a commencé.

Critique de Dracula

« Parce que les morts voyagent vite »

Jonathan Harker est un jeune avocat anglais dont les services sont engagés par l’énigmatique comte Dracula, un vieil aristocrate qui vit dans un château décadent au cœur des Carpates, pour gérer l’achat de certaines propriétés en Angleterre. Après un voyage aussi stimulant pour les sens que glaçant, Harker arrive dans le domaine de Dracula ignorant le véritable plan du Comte, ignorant que sa vie va se transformer en un cauchemar terrifiant.

Le mot que je cherchais pour définir l’une des œuvres littéraires les plus importantes et les plus légendaires est fascination. Presque tout y est rythmé par ce dangereux sentiment à double tranchant, comme l’attraction irrésistible que Dracula génère tant chez Jonathan Harker que chez le reste des personnages du roman, pour le meilleur ou pour le pire, connaissant sa personnalité diabolique, la transmission ténèbres. Une fascination comme celle que ressent le lecteur dès qu’il lit les premières lignes du journal de Harker, pris au piège d’un beau et macabre conte réalisé par le prince des ténèbres lui-même.

Dracula fait partie de la culture populaire, que vous ayez ou non lu le roman, que vous ayez vu ou non l’une des dizaines d’adaptations cinématographiques qui se font encore aujourd’hui, plus de cent vingt ans plus tard. Il y a Dracula en noir et blanc et en couleur (de Bela Lugosi un Gary Oldmanen passant pour Christophe Lee), Dracula dans les bandes dessinées, Dracula dans les dessins animés, dans les jeux vidéo, sur les boîtes de céréales et même, oui, sur Sesame Street. Un personnage tout-terrain qui s’adapte à l’époque, à tous les genres, avec une personnalité bien définie et une série de concepts associés à l’idiosyncrasie vampirique – il ne se reflète pas dans les miroirs, il déteste la lumière du soleil, les crucifix, l’ail et les pieux – que nous connaissons tous.

Cependant, aucune adaptation n’a réussi à rendre pleinement justice au roman. Se pourrait-il que je sois un romantique, comme l’œuvre originale elle-même, et même si certains cinéastes ont failli en transmettre l’esprit (je pense à Francis Ford Coppola), commencer la multitude de sensations merveilleuses que le roman génère semble une entreprise impossible. Bram Stoker a jeté un genre qui commençait déjà à expirer, le roman d’horreur gothique ou gothique (avec ses châteaux solitaires et décadents, ses entités surnaturelles et son atmosphère de brume et de mystère) pour le fusionner avec les éléments du romantisme, avec son torrent de émotions et chant à la liberté, pour créer une œuvre unique.

Dracula est l’un des romans épistolaires par excellence. L’œuvre de Stoker est construite à partir d’extraits de journaux intimes, de lettres, de fragments d’articles de journaux, de télégrammes et même de notes scientifiques. L’énorme puzzle qui en résulte fonctionne comme une montre suisse, englobant divers points de vue, une multitude de voix de personnages différents et apportant une certaine vérité à une histoire avec des éléments des plus fantaisistes et fantasmagoriques.

Les vampires, les malédictions, le sang et les enjeux ne sont que la surface de Dracula. Si vous commencez à creuser, vous ne trouverez pas seulement le cercueil occasionnel, vous trouverez également des thèmes profonds et variés, certains assez risqués pour leur époque. Au fond, Stoker crée une œuvre sur les passions, de l’amour le plus pur au désir le plus irrépressible, dénudant ses personnages et montrant leur grande vulnérabilité -celle de nous tous, en fait- face aux sentiments et aux passions les plus fortes. Rendre compte également de la peur de l’inconnu et de l’étranger, sujet d’une triste actualité.

Bram Stoker a créé un corpus d’œuvres qui va bien au-delà du folklore des vampires. C’est vrai qu’il en a posé les bases, mais en l’utilisant comme canevas pour une histoire au service de ses personnages inoubliables : le Comte, Harker, Mina, Reinfield, Lucy, le Dr Van Helsing… Car au final , Dracula est une histoire de monstres et d’hommes, sur la fine ligne qui sépare l’un de l’autre. Un traité sur l’amour, l’éternité et les appétits humains insatiables qui ne se démode jamais. Un classique totalement intemporel.

« Celui qui est maintenant parmi nous a la force de vingt hommes et une ruse acquise au cours des siècles. Dominer la nécromancie (…). Il peut apparaître quand il veut et où il veut, prenant les formes qu’il veut. Vous pouvez commander sur les éléments (…). Il exerce un pouvoir sur des êtres inférieurs (…) Mes amis : si nous échouons, nous pouvons finir comme lui et devenir des êtres dégoûtants se nourrissant des corps et des âmes de ceux que nous aimons » – Van Helsing.

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