Critique du premier long métrage de Rubén Martínez Castejón, Amante en Saigón
Titre: amant à saigon
Auteur: Ruben Martínez Castejon
Édition: Mots du monde
An: 1953
Pages : 320pages
Genre : Drame
Qualification:
L’auteur
Médecin, peintre, musicien et écrivain. Depuis dix ans, il habite Viêt Nam, où il assiste aux mutations d’une des sociétés les plus actives de la planète. L’exotisme, l’agitation d’une grande ville et la vie d’un émigré conditionnent son travail et sa vie.
Synopsis de Amant à Saigon
Saigon, la ville d’où l’on part en regardant en arrière en espérant pouvoir revenir bientôt, quitte à tout perdre. Deux amis ingénieurs capables de gérer des plates-formes pétrolières en Norvège sont inutiles à l’amour, et leur vie passe entre couples brisés jusqu’à ce qu’ils se retrouvent à Saigon. Le mariage de Lorena et Peter Booijink, et leur ami Bjorn Kartunen, forment un triangle amoureux impossible dont le médecin a été témoin Allistar, un psychiatre prisonnier de ses propres fantômes. Lorena va découvrir qu’elle a épousé un Asperger. Pierre subira la trahison de l’ami, de la femme et même de la servante ; et la famille sera déchirée lorsqu’un jeune couple vietnamien kidnappera leur bébé. Huyen et Hung représentent les extrêmes de la haute et de la basse société vietnamienne et la confrontation entre rêve et pratique. Loin de se cacher, Huyen et Hung mettront en ligne l’enlèvement sur les réseaux sociaux et déclencheront une tempête d’opinion sur Internet au sujet des droits des mères porteuses lors d’un voyage au Cambodge avec le bébé de Booijink dans le coffre d’une pizza à moto.
Amitié et trahison; les difficultés conjugales des individus avec des traits d’Asperger ; un portrait de la société immigrée étrangère de Saigon et des différences sociales vietnamiennes vu du point de vue d’un médecin, témoin et acteur de l’histoire.
Examen
Rubén parcourt le Saigon chaotique et exotique avec une passion débordante, posant sur l’idiosyncrasie et la société d’une ville qui naît et meurt à chaque seconde. Un volcan de contrastes qui décore tout le roman comme s’il s’agissait d’un voyage photographique. Son auteur a réussi à extraire toute la patine de la littérature qui se trouve dans cette ville vietnamienne et en a fait un personnage avec force, atmosphère et charisme. Sans être extrêmement descriptif, il rend le tout extrêmement visuel et sensible. Un art littéraire difficile à maîtriser, dont l’habileté transparaît dans ce premier long métrage.
Après avoir lu ce roman, il est difficile de ne pas avoir envie d’aller à Saigon si on n’y est jamais allé, ou encore plus difficile de ne pas avoir envie d’y retourner si on l’a déjà fait, quitte à tout perdre – paraphrasant le début du synopsis .
Il y a quelque chose qui m’a fasciné même au-dessus de Saigon, c’est la rapidité avec laquelle se déroulent les dialogues et les conversations entre les personnages. L’auteur a refusé l’utilisation excessive des indications scéniques et de la narration de remplissage dans les conversations, compensant ce manque par quelques brèves guillemets qui révèlent les pensées des interlocuteurs, créant ainsi des dialogues absolument riches et fébriles. Rubén a réussi à nous faire arrêter de lire pour qu’il semble que nous écoutions ou infiltrions les esprits de Lorena, Peter, Bjorn ou Allistar (à mon avis la pierre angulaire et l’engrenage de tout l’ensemble). Un psychiatre acide et morbide qui traverse son passé tout en étant témoin de celui de ses confesseurs.
Si vous ajoutez le pulc à celarité, grossièreté et esthétique de sa prose, c’est sans aucun doute un livre qui vaut la peine d’être lu attentivement, car derrière ce portrait intime des personnages et de Saigon se cache une puissante charge narrative et psychologique qui démembre les couches d’un livre obscène et toxique. et drame onctueux.
Mais… Que nous dit Amante à Saigon ?
Malgré le fait que l’alcool et le sexe inondent le roman, non, ce n’est pas une histoire d’amour classique ni une histoire frivole d’amants. Non, ce n’est pas Grey. On s’aperçoit bientôt que la rivière décrite par l’histoire mène à d’autres endroits plus reculés et troubles qui atteignent une plus grande profondeur, recouverts de boue que l’auteur creuse jusqu’à ce qu’ils remontent à la surface. Surtout, il déborde d’une critique ou d’un reflet d’une société divisée en strates. Pauvre riche. Une ville fragmentée entre progrès et déshumanisation, comme Dubaï, Istanbul, Qatar, etc…
Ainsi, Amante en Saigón est une confrontation continue d’intérêts et d’instincts humains, dans un large cadre d’intrigues conflictuelles qui convergent dans une exposition et une composition critiques et réflexives de repentance, de traumatisme, d’incompréhension, de classisme et de vulnérabilité d’un monde sans scrupules ni conscience morale. .