Critique ‘Good people’ de Margherita Oggero – Harper Collins


DES GENS BIENS || Marguerite Oggero || HarperCollins || 7 mars 2023 || 235pages

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Barrière de Milan se trouve à Turin. À la périphérie nord de Turin, pour être exact. Un quartier qui n’est pas riche mais plein de gens, dont les vies s’entremêlent, avec ce mélange de hasard et de destin, de mesquinerie et de générosité, d’amours et de haines qui caractérisent les vicissitudes des êtres humains. Par exemple ceux de Deborah, dite Debby, quinze ans, qui a interrompu l’école et est désormais baby-sitter et aide-soignante et qui propose à sa mère, Linda, jadis héritière d’une fortune modeste, de tuer son père, Oreste, devenu camionneur. chauffeur, et d’abord celui qui a brûlé la fortune de sa femme. Ou ceux de la veuve Caterina Mazzacurati, la femme dont Debby est aide-soignante (et dealer occasionnelle), qui pour empêcher son fils de la mettre en Ehpad a décidé de recontacter Arturo, l’amour perdu de sa jeunesse. Ou Florin, qui a une grand-mère en Roumanie, conduit le camion avec Oreste et aimerait avoir un appartement à lui. Ou encore Albachiara, propriétaire de la papeterie mais aussi d’un kiosque à journaux mais aussi d’une boutique de souvenirs, amie de Linda et ennemie jurée de Giuseppina Borgone alias Vanessa Delice, manucure et coiffeuse à la solde du coiffeur Alexander The Best. Et d’une manière ou d’une autre, d’un lieu et d’un temps lointains, les événements de Lana Turner, diva hollywoodienne et peut-être meurtrière, entrent également en scène… Renvoyant au lecteur le chœur de l’existence humaine, dans toutes ses misères quotidiennes et sa soudaine splendeur ce jour-là. après jour s’entremêlent dans une même intrigue, Margherita Oggero, d’un regard à la fois impitoyable et très doux, écrit un roman suspendu entre Balzac et le cinéma des frères Coen.

Dans ce livre, Oggero contient de nombreux petits mondes faits tour à tour de micro-réalité que le lecteur apprend page après page. Les 80 premières pages sont particulièrement difficiles, malgré le fait qu’au début du roman notre tâche est facilitée par deux faces contenant la liste complète des personnages (oui, DEUX FACES ENTIÈRES !).

Combien d’entre eux sont vraiment nécessaires à l’histoire ? Moins d’un tiers ; tous les autres sont un accompagnement inutile et chaotique, amplifié par le choix de donner le même nom à deux personnages différents, choix qui ne fait qu’augmenter la déjà grande confusion qui accompagne le récit.

La pierre angulaire de ce roman est Deborah et ses parents, Lidia et Oreste : ils vivent dans un petit appartement à la périphérie de Turin, Barriera Milano, un mauvais quartier, avec des gens peu recommandables. Comment ils en sont arrivés là est une de ces choses que nous découvrirons, de manière assez superficielle, au cours de la lecture.

Autour d’eux gravite toute une série de personnages, aucun vraiment secondaire étant donné le choix stylistique d’Oggero qui fait également passer Déborah, Oreste et Lidia pour secondaire.

Les histoires s’entremêlent, s’emmêlent, s’embrouillent: on voit apparaître des noms et on peine à reconnecter leurs visages et leurs situations. Tout se ressemble, créant un enchevêtrement qui semble impossible à démêler ; certains personnages impressionnent, d’autres agacent, mais peu, peut-être une seule en ce qui me concerne, me va droit au cœur : Caterina Mazzacurati, 92 ans, veuve. Elle aurait certainement mérité toutes les pages de ce livre ! Son histoire aurait eu besoin d’une portée plus large, de couleurs à lui ; au lieu de cela, Oggero la relègue, comme tout le monde, à un second rôle, nous laissant d’ailleurs assez bouche bée sur le final.

En lisant, l’impression d’être assise à côté d’une grand-mère âgée et un peu étourdie prévaut, une de celles qui, les mornes dimanches après-midi d’hiver, plongent dans leurs souvenirs et nous inondent d’histoires un peu décousues sur leur jeunesse, nous remplissant la tête du des noms d’amis et de parents absolument inconnus pour nous !

Et si à la fin du roman on arrive avec une sorte de confusion mentale, le dernier chapitre donne encore un autre doute : qu’est-ce que l’accélération de la rotation de l’axe terrestre a à voir avec cette histoire ? A la réflexion, un lien pourrait aussi être trouvé, mais le « mah » qui imprègne ce roman est difficile à éradiquer et invalide toute réflexion ou justification que l’on voudrait attribuer aux choix de l’auteur.

L’écriture de Margherita Oggero reste incontournable, que l’on ne découvre certainement pas aujourd’hui et qui nous a offert au fil des ans des pépites littéraires uniques !